Des textes de Recours Radiation, Samuel Churin et du Collectif les Matermittentes.
La table concertative « intermittence » du 18 septembre
Ce texte n’est pas un compte-rendu de commission, mais une information, au départ rédigée à l’intention des camarades avec qui nous avions travaillé pour convenir de ce que nous devions dire dans cette instance.
Pour donner les éléments du contexte, il s’agit plus pour moi de « justifier » le fait que je n’ai pas pu TOUT DIRE, alors que nous avions préparé un gros pavé ! Ceci explique le « je » récurrent.
En ce qui concerne l’atelier Pôle Emploi [1], ils ont décidé de mettre les employeurs d’un côté et les salariés de l’autre. La raison officieuse : nous étions trop nombreux car certains ont décidé de venir, malgré les consignes, à deux par orga... « pas vous... mais... ». Alors, j’ai attaqué dans le vif du sujet : « Ça commence mal ». Après la suppression de l’atelier formation, voilà qu’on divise cet atelier en deux... Atelier commencé tardivement (plutôt plus de 10h que moins) avec une info relative à la fin des travaux qui devait avoir lieu vers midi.
Avec mon tableau de 24 pages sur lesquelles nous avions tenté de lister tout ce qui ne va pas à Pôle Emploi, à Pôle Emploi Service et au GUSO, comment sont traités les chômeurs, comment les règles sont interprétées de manière restrictive, comment les chômeurs intermittents ou pas deviennent suspects (contrôle en tout genre, contrôle mandataire, etc...)... et en face, à chaque fois, les textes qui sont bafoués dans chacune des situations – ce qui doit s’appliquer selon la loi, le règlement, le code du travail... Avec mon tableau de 24 pages j’en ai bavé les amis.
L’homme à la mèche disciplinée a commencé par faire un laïus pour tenter de calmer le jeu, a proposé un tour de table ce qui nous a bien occupés pendant un petit moment (Je porte, je porte, la clé de saint Georges, quand j’l’aurai assez portée, je la laisserai tomber ♫ ♫ au pied d’un rocher ♫ )...
J’ai pu parler :
des déclarations tardives qui n’en sont pas puisque Pôle Emploi reçoit l’AEM – Attestation Employeur Mensuelle - très vite, au dire même de Madame Règlementation Pôle Emploi, donc la déclaration du demandeur d’emploi vient confirmer celle déjà reçue par Pôle Emploi et, si écart il y a ou si la déclaration du demandeur d’emploi n’est pas concordante, Pôle Emploi devrait se mettre en rapport avec les deux parties pour corriger, plutôt que d’attendre la prochaine ouverture de droits pour coincer le chômeur, et décider, qui plus est, que cette période ne sera pas comptabilisée pour la prochaine ouverture de droits. J’ai rappelé que c’est exactement ce qui s’était passé à Nantes pour Monsieur Chaar, et que nous espérions que les partenaires sociaux allaient revenir sur ce qui produisait des indus et des droits non pris en compte, et avait provoqué un drame. Or, ce n’est pas le cas, et, plus grave, il faudra cette fois que ceux du régime général fournissent tous les documents pour être indemnisés, faute de quoi, le mois suivant le premier versement de leurs indemnités, les paiements seront bloqués et les indemnités déjà versées devront être remboursées. J’ai fait remarquer qu’au dire de Pôle Emploi Monsieur Chaar n’avait rien à se reprocher. Pas de fraude. Pourtant, la nouvelle convention aggrave ce type de problèmes. Les indus ne vont pas disparaître mais s’amplifier.
du double contrôle concernant les attestations employeurs pour les emplois au régime général et AEM pour ceux dépendant des annexes 8 et 10, avec le désengagement de Pôle Emploi quand le demandeur d’emploi aura du mal à obtenir cette attestation. Avant, Pôle Emploi la réclamait lui-même à l’employeur. Il ne le fera plus. J’ai cité l’exemple de cet homme qui a dû envoyer 18 courriers en recommandé et accusé de réception pour demander ces attestations employeurs, car Pôle Emploi refusait de l’indemniser sans ça. J’ai aussi parlé de ces contrôles, quand il y aura 3 mois sans indemnités, qui vont bloquer l’indemnisation de ceux qui devraient pouvoir y prétendre [2].
des contrôles mandataires et des documents qui sont de véritables pièges pour les demandeurs d’emploi à qui on pose des questions qui ne les concernent pas, mais concernent l’employeur, à qui on demande des justificatifs détenus par l’employeur, et qui, quand ils les réclament à leur employeur pour être indemnisés plus vite, deviennent encore plus suspects qu’ils ne l’étaient. Décisions de rejets non motivées ni en fait, ni en droit, pas d’infos sur les droits de recours.
de PES-Pole Emploi Service- et GUSO qui interprétaient les textes et disaient qui était artiste et qui ne l’était pas, ce qui était un spectacle et ce qui ne l’était pas. La CGT, elle aussi, est intervenue sur le sujet. J’ai dit qu’ils incitaient parfois des intermittents à se mettre en auto-entrepreneur alors que il est strictement interdit de travailler sous ces deux régimes à la fois. La CGT a parlé des heures, des cachets et de l’exigence d’un contrat unique même quand la représentation a lieu longtemps après les répétitions ou des interprétations quand les répétitions ne sont pas suivies d’une représentation. Et est venue avec des offres farfelues, illégales,etc... Elle a relevé les problèmes liés à l’insuffisance des offres d’emploi et au recueil des offres sans contrôle, sans actions correctives.
PES nous a expliqué ses missions et leur organisation. Ils nous ont dit quelles régions étaient sous la coupe de PES concernant l’indemnisation des intermittents (en fait il n’en reste plus que 3 qui n’y sont pas, dont Ile de France et Midi Pyrénées. Ile de France, c’est + de 40 % des intermittents et Midi Py, préparez vous, c’est pour bientôt, novembre il me semble !), les modes de contacts pour les intermittents : tél 3949 (qui réorienterait sur une plateforme spécifique intermittence), les mails, parfois les courriers, mais les intermittents n’écrivent pas beaucoup de courriers. A noter, dans les 3 missions, l’absence du conseil et de l’information - (ce qui est complètement illégal, voir jurisprudence de la cour de cassation à ce sujet : Arrêt n°10-30892 du 08 février 2012 de la chambre sociale de la cour de Cassation).
J’ai demandé pourquoi il y avait un Médiateur affecté à PES alors que les Médiateurs sont affectés à raison de un par région, la réponse c’est : PES est une région !!! J’ai demandé quelle région et Monsieur PES (Leclerq) m’a dit : la région Pôle Emploi Service !
J’ai expliqué que c’était toujours très frustrant de ne pas pouvoir tout exposer, et que des missions d’information avaient déjà eu lieu, pour dire les mêmes choses, que le Médiateur national pondait des rapports et que les choses ne bougeaient pas, au contraire.
Bref, j’ai beaucoup parlé, mais je n’ai pas tout dit :
Rien sur le bénévolat (mais ce n’est pas un choix, juste une difficulté à tout dire)
Rien sur la carte vitale exigée pour indemniser les demandeurs d’emploi (ça m’énerve de ne pas en avoir parler c’est une vraie calamité)
Rien sur les règles d’inscription à Pôle Emploi en dehors des clous.
Je n’ai pas fait dans la dentelle, mais plutôt travail au crochet, donc avec des trous...
J’ai exigé des réponses dès la semaine prochaine sur les indus, les AEM... et assisté à l’hilarité quasi générale.
A la fin j’ai resservi le couvert sur les chiffres, et les moyens pour les expertises, et là on a pu assister à un grand numéro genre : « Je te noie le poisson sans répondre à la question ». Donc j’ai dit à Jean-Patrick, qui m’appelle Rose-Marie même quand je l’énerve, qu’il n’avait pas répondu à ma question. Lui ai rappelé que, dès le début des tables rondes, il avait été dit qu’il faudrait faire vite car ce travail d’expertise serait long, et là, il n’était pas capable de dire sur quels chiffres les experts allaient travailler, ni quels moyens étaient prévus, alors que certains experts avaient pris leurs dispositions pour remplir cette mission, notamment Mathieu Grégoire... Et il m’a dit qu’il n’avait pas à répondre à mes injonctions. Je lui ai dit qu’interpréter des chiffres déjà interprétés, c’était pas sérieux, ou quelque chose d’approchant, et que s’il ne voulait pas qu’on parle d’enfumage comme il l’avait regretté lors d’une séance précédente, il valait mieux qu’il ne nous donne pas ce genre de réponse sinon, faudrait pas qu’il s’étonne... que des tweets ou tracts partent dans la foulée... Ensuite, il s’est égaré, et ça semblait l’amuser de se perdre dans les méandres de son ego surdimensionné tout en faisant gaffe de ne pas ébouriffer sa coiffure.
Bien entendu, je n’ai pas oublié mes anciens collègues de Pôle Emploi, ni mes amis notamment ceux qui ont en charge la gestion des droits. Et j’ai rappelé que si nous étions inquiets pour les chômeurs qui vont avoir du mal à obtenir des informations, nous étions tout aussi inquiets pour le personnel de Pôle Emploi dont certains, en revenant de congé, ont pu lire des messages qui saturaient leur boîte, auxquels ils ne comprenaient rien puisque toutes les terminologies, les codes, les abréviations avaient changé et ils avaient l’impression, en lisant ces messages, qu’il ne s’agissait plus de leur métier. Probablement que c’est remonté à la Direction puisque, dans la précipitation, sont organisées des piqûres de rappel, par groupes de 130 dans des amphithéâtres !
Voilà, c’est incomplet...
On devrait avoir une retranscription de l’enregistrement dans les prochains jours. Je le tiens à la disposition de qui veut l’entendre et le coller quelque part.
Pour finir, l’homme à la mèche disciplinée (Jean-Patrick Gille pour ceux qui ne l’aurait pas reconnu) s’est épanché devant l’ascenseur et, reprenant une phrase d’une personne présente autour de cette table décidément pas ronde du tout, a exprimé sa conclusion à Combrexelle : « En fait quand il n’y a pas de problème tout va bien, c’est quand il y en a que cela devient compliqué à résoudre » . Il n’a pas bien compris ce qu’on lui disait, ou bien il a l’oreille très sélective, puisque nous n’avons cessé, la CGT et moi, d’expliquer que les problèmes, ce sont Pôle Emploi, Pôle Emploi Service, le GUSO et le Service des Fraudes qui les créent en allant chercher des poux dans la tête des chômeurs suspects a priori, en interprétant les textes en leur défaveur, en prenant des prérogatives qu’ils n’ont pas (blocage d’indemnisation qui appartiennent au Préfet via la DIRECCTE), en mettant de la distance entre les chômeurs et le service public (3949, internet, mails, et quand Pôle Emploi déménage, ils se débrouillent pour se planquer dans des zones éloignées désertées parfois même par les transports en commun).
A bientôt
Rose-Marie
Recours Radiation
On en est où ?
Beaucoup nous demandent : « On en est où ? ». Question courte mais la réponse pourrait prendre des heures. Pour résumer : Valls met en place une « concertation » censée mettre à plat le régime de l’intermittence. Quatre tables rondes sont organisées au mois de juillet, nous y participons de manière offensive, mettant en avant nos propositions.
Plusieurs points essentiels sont abordés :
Pôle Emploi et Pôle Emploi Service sont des zones de non droit. Des dossiers sont bloqués sans preuve, les chômeurs stigmatisés et considérés à priori comme des fraudeurs, des contrôles mandataires exercés sur les plus faibles structures sans aucune raison objective, tout est fait pour priver de droits les 4 chômeurs sur 10 encore indemnisés
Le GUSO n’échappe pas à ce constat : des règles inventées au quotidien pour que des heures travaillées et déclarées ne soient pas comptabilisées dans les 507 h
Nous voulons des droits pour les congés maternité et maladie, des règles adaptées à la discontinuité
Nous voulons un modèle d’indemnisation redistributif, mutualiste et non assurantiel. Pour rappel ce sont les exclus du régime qui financent les assedics versées aux salariés à hauts revenus. Pour cela, revenir sur un principe de date anniversaire, 507 h, 12 mois. Nous demandons à avoir les chiffres de l’Unedic, que les simulations soient vérifiées par nos experts. Pour cela, travailler à partir des fichiers sources est indispensable. Sinon nous subirons toujours les mensonges des publications de l’Unedic qui, nous le rappelons, est au service du Medef.
Nous avons remis en cause le paritarisme. Il faut le crier haut et fort : le dialogue social dont on nous parle tous les jours n’existe pas. Le Medef a 50% des voix, aucun accord ne pourrait être signé sans lui. Il a donc de fait un droit de veto. Pas étonnant que tout se passe dans ses locaux selon sa feuille de route.
Suite à cela, il est décidé de reprendre à la rentrée sous forme de table de travail.
Le 18 septembre nous étions invités à participer à 2 « ateliers » en parallèle :
Protection sociale : Congés maternité, maladie, retraite
Rapports avec Pôle emploi, Pôle emploi service, guso
Nous avons décidé de mandater celles qui avaient le plus travaillé ces questions à savoir :
Collectif « les matermittentes » pour l’atelier sur la protection sociale
Recours Radiation (association d’aide aux chômeurs) pour l’atelier Pôle emploi
Une fois de plus, ces ateliers ne sont pas du tout à la hauteur de l’enjeu. Nous avons d’abord demandé à ce qu’ils soient prolongés, comment évoquer tous les problèmes en 3 heures ? Et bien non, on en restera là.
Pour résumer, il n’y a absolument aucune volonté de régler tous ces problèmes. Ou plutôt on cherche à colmater des énormes entailles avec du sparadrap. Les éléments de réponse éventuellement apportés sont inacceptables, des micro mesures par ci par là.
Nous n’avons toujours pas les fichiers de l’Unedic, et lorsqu’il est demandé à Jean-Patrick Gille : « Peut-on savoir quand la comparaison des modèles d’indemnisation aura lieu, sur quelles bases, avec quel fichier ? », sa réponse est « Je n’ai pas à répondre à vos injonctions ».
De plus, nous allons clairement vers un petit toilettage pour éteindre le feu : le différé d’indemnisation annulé et financé par l’état provisoirement sera certainement prolongé. Il faudra anticiper cette fausse bonne nouvelle. Nous aurons à rappeler que le problème de fond n’est pas du tout celui-là, que nous avons des propositions justes, qu’une aide de l’état est toujours discrétionnaire et peut disparaître du jour au lendemain, que nous sommes contre le début d’une caisse autonome mais pour de vrais droits collectifs.
Ces tables rondes mettent en avant le fond du débat : le dossier est politique et il exige une réforme en profondeur. Une grande réforme de société. Nous vivons dans un monde pensé pour l’emploi stable. Il faut cependant rappeler que les chômeurs à activités réduites sont passés de 500 000 à 1,7 millions en 20 ans, 86% des embauches se font en CDD, l’intermittence n’est pas réservé au secteur du spectacle, l’intermittence de l’emploi touche tout le monde. L’inadaptation de notre monde à la discontinuité, voilà l’enjeu. Et cette phrase est une cruelle réalité pour les malades et femmes enceintes non couverts par la sécu parce que non indemnisés par l’assurance chômage.
Nous ne nous en sortirons pas avec notre petite réserve d’indiens, stigmatisés comme privilégiés et bénéficiaires d’un régime trop généreux. Après avoir démontré qu’un intermittent du spectacle ne coûtait pas plus cher qu’un autre chômeur, que notre déficit n’en était pas un, qu’il fallait arrêter de baisser la tête sur le thème des privilèges, il faut affirmer qu’il n’y a pas de honte à travailler de manière discontinue. Cette intermittence, choisie ou subie, doit être couverte. Les droits doivent être attachés à la personne.
Contrairement aux idées reçues, donner des droits aux précaires, c’est aussi renforcer les droits pour les salariés à l’emploi stable. Que se passe t-il actuellement ? Les salariés en CDI savent qu’une armée de réserve peut prendre leur place. Ainsi, toutes les conditions sont acceptées et gare à celui qui discute. Oui, la règle est simple : moins il y a de droits pour les chômeurs, plus le lien de subordination (celui qui lie un employeur au salarié) est important. On comprend mieux pourquoi le Medef tient absolument à garder la main mise sur l’assurance chômage, il met en place son projet avec la complicité de tous les gouvernements. Pour rappel sur les 50 milliards d’euros d’économie en 3 ans du pacte de responsabilité, 2 milliards sont prévus pour l’assurance chômage. Autrement dit cette économie sur le dos des pauvres a été conjointement décidée par Hollande et le Medef. Et ces réformes ne provoquent aucun remous pour une raison principale : la refondation sociale dictée par le Medef, à savoir des domaines réservés (comme la gestion de l’Unedic) sur lesquels il est clairement demandé aux politiques de ne pas intervenir.
Ainsi nous vivons dans un monde où des dirigeants politiques parlent de plein emploi et ont des recettes pour cela. Comment peuvent-ils penser que leurs promesses sont crédibles ? Qui peut croire que 6 millions d’emplois stables seront créés ? Pourquoi ce dictat de l’emploi à tout prix ? Nous ne cesserons de rappeler que 6 intermittents sur 10 tout comme 6 chômeurs sur 10 ne sont pas indemnisés. Imaginons 6 malades sur 10 non couverts par la sécurité sociale ! Nous, intermittent du spectacle, savons à quel point la continuité de revenu sur une discontinuité d’emploi est un enjeu majeur. Nous nous devons de porter ce débat haut et fort, nous devons partir de notre expérience et convaincre, nous devons nous battre pour une société adaptée à nos pratiques.
Oui nous devons continuer à participer à cette concertation, et nous continuerons à exiger des réponses. Mais ne nous voilons pas la face : nous n’obtiendrons rien sans un grand mouvement national.
Alors mobilisons-nous autour des questions suivantes, qui pourraient être des slogans à marteler partout :
Le dialogue social n’existe pas
10 chômeurs sur 10 doivent être indemnisés
Des droits adaptés à la discontinuité de l’emploi
Faisons de l’assurance chômage un grand enjeu national.
Samuel Churin
Quand est-ce qu’on dit non ?
La concertation est l’action pour plusieurs personnes de s’accorder en vue d’un projet commun.
La séance du 18 septembre, intitulée « Accès à la protection sociale », s’est illustrée dans le plus parfait contresens donné à cette définition.
Un silence opaque a tout d’abord régné dans la préparation de la séance : aucune communication préalable sur la présence des différents acteurs, aucun planning, ni ordre du jour, aucun retour de mail suite à nos propositions pour y pallier. Nul n’est d’ailleurs besoin de rappeler le contexte dans lequel ont été définies ces fameuses concertations.
La séance s’est ouverte par un florilège de problématiques « protection sociale » en dépit de notre volonté d’axer la séance sur la responsabilité de l’UNEDIC et de la Sécurité sociale dans l’absence ou la réduction des droits aux congés maladies et maternité des salariés intermittents. Responsabilité pointée du doigt par le Défenseur des droits.
La séance s’est poursuivie sur le mode de l’évitement, car notre lecture appelle un choix politique, comme l’a rappelé Monsieur CGT- spectacle, bien plus que le listage d’une série de questions techniques liées à l’harmonisation entre différents régimes salariés, chômeurs, assurés. A cet égard, nous avons quand même rappelé que prendre en compte la discontinuité de l’emploi ne se résume pas à doubler la période de référence pour la recherche des heures, ni même à abaisser les seuils, mais bien à prendre en compte la fréquence des contrats de travail et l’alternance entre les périodes de chômage et de travail, que les problèmes d’indemnisation ne sont pas propres aux annexes 8 et 10 et que le problème posé est également le même pour l’accès aux congés maladie... Bref, nous avons argué le plus large possible afin de faire entendre que les dispositions actuelles des différents organismes de protection sociale ne sont pas adaptées, ni même coordonnées entre elles.
L’assemblée s’est certes accordée à dire que la perte de revenus liée à la maladie ou à la maternité était vraiment terrible, « presque un problème humain », selon Madame FO. Nous avons découvert avec surprise que « les matermittentes » avait fait l’objet de discussions antérieures, à l’UNEDIC - grâce à Carla Bruni (sic !), au CNPS, à l’Assemblée Nationale par la voix de JP Gille et consort. Pour autant, les intervenants, en particulier Madame Direction Sécurité sociale, présente ainsi que Monsieur Unedic, ont fait preuve tout le long de la séance d’une surdité démentielle.
Monsieur UNEDIC a exposé avec un aplomb déconcertant que « c’est un sujet de négociation d’assurance chômage et s’il n’a pas été pris en compte lors de la convention du 14 mai 2014, c’est de la responsabilité des négociateurs de ne pas faire évoluer la réglementation ».
Quant à Madame Direction Sécurité sociale, elle a renvoyé le ballon : « Nous, on n’a pas de prise sur ce qui peut ou pas être négocié du côté de l’assurance chômage. Ne croyez pas qu’on refuse de discuter de ces sujets-là, c’est juste qu’il y a une législation, chaque réglementation vit sa vie et est gérée par ses organismes soit par voie réglementaire, soit par voie conventionnelle, soit par un mélange des deux. Là, le constat est posé, s’il y a une solution qui doit être trouvée sur ce sujet-là. Là, c’est un aspect qui échappe à notre champ ». Puis d’ajouter qu’il existe des problèmes d’application et d’interprétation des textes.
Quel argument en or ! Savamment alimenté par quelques intervenants et repris en boucle tout au long de la séance par Monsieur Mission Intermittence.
On a bien essayé de dire qu’il y a un vrai souci de droit (hiérarchie des normes [3]), de principe (la capitalisation au détriment de la mutualisation), et d’obsolescence des textes. En vain !
Nos interlocuteurs ont trouvé un bon point d’appui dans l’intervention de Madame FO déclarant : « l’UNEDIC ne peut pas régler tous les problèmes. Est-ce que l’UNEDIC doit se substituer à un organisme social, pour les longues maladies, pour les accidents du travail, pour les femmes en maternité, le problème, il va être là, qui va financer ? »
L’assemblée s’est alors engouffrée dans l’idée d’une résolution du problème dans le cadre de la prévoyance, par accords de branche. Des réserves toutefois, Monsieur CGT-spectacle disant « il faut qu’on en discute... » et nuancé par un syndicat d’employeurs « Faut-il encore que notre accord soit légal et que nous ne soyons pas inquiétés par des opérateurs concurrents à Audiens, qui nous contraignent à mettre en concurrence différents opérateurs sur ce régime spécifique qu’on a mis en place depuis plusieurs années ».
Madame Audiens a sauté sur l’occasion pour confirmer que son organisme est réellement compétent, pour accueillir la problématique : « le gros avantage d’Audiens, c’est le fait qu’il ait une vision sur toute la carrière d’un intermittent et c’est un lieu où on le prend le plus possible dans sa globalité. Il y a un volet indemnitaire, le fond de professionnalisation qui est géré par Pôle Emploi, puis il y a le volet accompagnement social qui est confié à Audiens et qui là prend en compte les problématiques de santé et les problématiques sociales. On voit que le problème majeur exposé ce matin, c’est le problème de la coordination de l’accès aux droits ».
Certes. Et la Direction de la Sécurité Sociale de fermer totalement la porte à un changement de la réglementation : « il y a 2 sujets, il y a un sujet d’application de la réglementation et de clarification de points. Ensuite, il y a des sujets plus généraux de l’évolution ou pas de la réglementation sur des points qui posent difficulté, mais bon, vous comprenez bien qu’il y a des enjeux financiers (...), vous êtes en plus dans des professions où l’enchaînement d’emplois, de types d’emplois, de types de contrats, de facteurs d’affiliation, fait que la réglementation ne peut pas aller dans le détail. Evidemment, vous n’allez pas trouver les réponses, tous les cas pratiques dans les textes, dans les circulaires ou dans les mails qu’on peut vous faire ».
Monsieur CFDT est alors intervenu pour faire une proposition magistrale : « pourquoi les personnes qui n’ont plus rien ne sont pas fléchées vers le fond de professionnalisation ? »
Ce qui a permis à Monsieur Mission Intermittence de conclure ainsi : « moi, mon sentiment c’est que sur un certain nombre de problèmes qui se posent, il y en a qui ont déjà leur réponse, 5 ou 6, avec des problèmes d’application. Après, on voit comment on traite les autres points avec des renvois à des accords de branche. (...) A un moment, faudra réfléchir à ce qui relève de l’interpro et ce qui relève du secteur professionnel. Je pense qu’à un moment on dira, il y a tel ou tel point qui relève de l’interpro, voire de la solidarité nationale et puis il y a un accord qui relève d’un accord au niveau des branches ».
Bref, la concertation a permis à « plusieurs personnes de s’accorder en vue d’un projet commun » qui, vu de notre petite porte, ressemble fort à la mise en place d’un coin insalubre, à l’abri de la lumière, « fléché » pour ceux qui ne savent pas lire les règles de privatisation de la protection sociale.
Une énième mesure peut-être, des miettes désarticulées et sans aucun rapport avec les nouvelles formes d’emploi dont l’intermittence est la face visible de l’iceberg.
Quand est-ce qu’on dit : non ?