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Chômer payé ! CASH, mai 1985

Publié, le lundi 28 mars 2011 | Imprimer Imprimer |
Dernière modification : lundi 27 juillet 2015


Nous poursuivons la publication d’articles du journal de chômeurs et précaires CASH (1985-1989) [1]. Celui-ci a été écrit en 1985, trois ans après que la gauche au pouvoir ait commencé à restreindre les droits des chômeurs, faisant basculer la majorité des chômeurs dans la non indemnisation, avant même le blocage des salaires de 1983 (le « tournant de la rigueur »).
L’’instauration en 1988 d’un revenu minimum de faible montant, non individuel, réservé aux plus de 25 ans (« pour préserver la dignité des jeunes en leur évitant l’assistance » selon Martine Aubry), et réservé aux étrangers pouvant démontrer deux ans de séjour légal sur le territoire [2] viendra répondre à la « nouvelle pauvreté » et aux revendications de garantie de revenu des mouvements de chômeurs et précaires de l’époque.
12 ans plus tard, Lionel Jospin, alors premier ministre, répondait à une mobilisation d’une ampleur inédite des chômeurs et précaires par une séance de concertation, la création d’un fonds d’urgence provisoire et d’une prime annuelle de fin d’année (dite « prime de Noël ») tout en donnant une fin de non recevoir aux exigences alors exprimées (« un revenu c’est un dû »). L’envoi de la police pour déloger de multiples occupations venait alors prendre le relais de ses déclaration, où devançant Sarkozy dans la stigmatisation de la solidarité et l’invocation de la valeur travail, il indiquait « préférer une société de travail à l’assistance ».

Chômer payé !

Depuis 1975, le nombre de chômeurs n’a cessé d’augmenter pour atteindre aujourd’hui 3 millions de personnes. Ces chiffres sont significatifs d’une nouvelle gestion capitaliste de la main d’oeuvre, celle de la précarité [3] (du sans emploi et sans-papier, en passant par l’intérimaire et le travailleur au noir).

Les réponses à cette situation n’ont pas varié d’un pouce depuis 10 ans : d’un côté, celui du pouvoir, on attend le « bout du tunnel », la fin d’une crise économique « venue d’ailleurs » et l’arrivée de l’ange de la relance qui multiplierait les nouveaux emplois et, dans l’attente de ces jours meilleurs, eh bien serrons-nous la ceinture ! et de l’autre, qui n’est qu’une variante du premier, la réponse syndicale traditionnelle : il faut lutter contre la casse des usines, maintenir l’emploi par l’injection de milliards dans des entreprises qui travaillent à perte, ou, au mieux, se partager le travail (35 heures), quitte à perdre du revenu. Le problème de ces deux réponses, et le patronat le sait bien, est de croire que les usines supprimées refleuriront un jour. L’appareil productif connaît des mutations profondes ; l’apport des technologies nouvelles permet de produire davantage en utilisant moins de main d’oeuvre, surtout dans certains secteurs comme l’automobile où la crise permet de légitimer la destruction des bastions syndicaux. L’usine traditionnelle, fondée sur le machinisme, tend à faire disparaître au profit de petites unités productives qui, grâce à l’informatique, à la robotique, peuvent faire face aux nouvelles normes de compétitivité, embauchant et débauchant du personnel au gré de leurs besoins sans avoir à négocier. Ces entreprises, utilisées en sous-traitance, permettent d’amortir les chocs économiques en protégeant l’usine-mère. Dans ce nouvel ordre, le travailleur précaire, c’est-à-dire mobile et sans garantie d’emploi ni de salaire, devient la figure idéale pour le patronat. Elle permet une flexibilité économique nécessaire à la recherche d’un taux de profit acceptable.

Ces quelques vérités (1) ne sont pas nouvelles, mais elles n’ont jamais influé sur le discours revendicatif. Se battre pour retrouver du travail disparu est absurde ; négocier un partage du salaire entre ceux qui ont un emploi et ceux qui n’en ont pas est intolérable car c’est accepter le schéma patronal. Depuis 1974, la courbe de richesses des pays industriels n’a cessé de croître parallèlement à la courbe du chômage.

Il faut donc se battre pour une meilleure redistribution de la richesse nationale, avec comme premier point de revendication : le droit au revenu garanti pour tous. L’état attribue (2) déjà diverses formes de revenu, mais toujours avec parcimonie, accompagnées d’un contrôle étroit en contrepartie (allocations, stagees de formation, TUC, etc.).

Exigeons pour tous le droit à un revenu minimal, garantie indispensable à l’existence de chacun, quelques soient les dysfonctionnements du système économique dont nous sommes les derniers responsables.

De plus, partager la richesse nationale signifie également augmenter la part du budget social de la nation pour financer, entre autres, l’organisation de lieux où les individus puissent retrouver une expression collective [4].
Organisons des maisons sociales qui seraient tout à la fois l’intermédiaire entre l’isolement du travail et celui du domicile, une expérience de socialisation des individus, un moment d’échange culturels, intellectuels, et un lieu d’entraide ouvert sur le quartier, la ville.

L’émergence du syndicat des chômeurs en 1982 et la naissance de leurs maisons marquent clairement ces besoins : la nécessité de s’organiser en dehors des syndicats qui n’ont jamais voulu prendre en compte leur spécificité ; celle de n’être sur aucun lieu de production, et ce besoin vital d’être ensemble, de rompre la solitude face à une société qui les exclut.

Ces expériences doivent être prolongées et multipliées.

(1) Bien senties.
(2) Epithètes, demain y’en aura moins.

Association des précaires (Paris), mai 1985

Chômer payé !

L’Association des chômeurs et précaires de Paris publiera ensuite le journal CASH dont on trouve sur internet :

Les chômeurs c’est la classe, tract diffusé à la manifestation des chômeurs du 30 mai 1985
Conseil gratuit, CASH n°1, décembre 1985.
Les Bourses du travail, berceau de l’identité ouvrière - CASH, journal des chômeurs et des précaires, 1986, n°2, mars 1986.
L’idéologie est la première arme des exploiteurs, n°3, juin 1986.
Étudiants, si vous saviez, n°5, janvier 1987.

Sommaires et pdf de la revue CASH (1985-1989)

Nous refusons que tout au long de la vie la durée d’emploi gouverne nos existences et les soumette toujours plus au commandement de l’argent



Notes :

[2On lira également à propos de cette période Trois critiques des années Mitterrand, en prenant pour point de départ le présent, par exemple au moyen de l’article qui suit consacré à un « modèle allemand » dont le fonctionnement résulte de plusieurs contre réformes de la protection sociale du chômage (les plans Hartz) décidées par une coalition « rouge-verte ». Il décrit les dégâts sociaux (20% de pauvres et une espérance de vie en baisse...) auxquels peut conduire un gouvernement de gauche, lorsque la mobilisation sociale des premiers concernés n’est pas au rdv ou/et ne parvient pas à imposer ses vues : Dette et austérité, le modèle allemand du plein emploi précaire.



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