L’OMC est aujourd’hui l’organisme international le plus puissant parce qu’il
concentre le pouvoir de faire les règles, de les faire appliquer et de
sanctionner les pays qui ne les respectent pas.
L’AGCS est un des 60 accord signés en 94 dans le cadre de l’Uruguay round, c’est un accord cadre « non pleinement abouti » c’est à dire qu’il soumet les
pays membres à l’obligation de renégocier périodiquement vers toujours plus
de privatisation de service, à terme aucun service ne pourra échapper à la
libéralisation
(art 19).
Et le commissaire européen, qui négocie seul pour l’Europe, tout comme le
gouvernement français ne disent pas la vérité lorsqu’ils citent l’art 1-3b
« l’accord englobe tous les services dans tous les secteurs à l’exception
des services fournis dans l’exercice du pouvoir gouvernemental .. » pour
faire croire que l’Education n’entre pas dans le cadre de la négociation :
ils « oublient » le paragraphe suivant de cet article stipulant que seuls
les services fournis « ni sur une base commerciale, ni en concurrence avec
un ou plusieurs fournisseurs de services.(seront épargnés). » -du moment qu’il existe des écoles et des cliniques privées, l’ensemble du secteur est privatisable- de fait seuls les services dits régaliens : armée, justice, police seront épargnés.
Dans la stratégie de l’OMC on trouve aussi la mise en place d’un marché
mondial du travail de type :
« contrat à durée déterminé »( mode 4) dont l’objectif est bien sûr de
déréglementer (la fonction publique par exemple) mais aussi de tirer vers le
bas salaire et droits sociaux, voire de les faire disparaître en tant que
« réglementations intérieures plus rigoureuses que nécessaires » (art 6.3,
23) ce que l’on peut à mettre en relation avec les projets sur la Sécurité
Sociale, sur les retraites, sur la modifications des statuts et sur
l’ouverture de la Fonction Publique aux contrats de droits privés.
l’OMC tend à réduire les droits des états à mettre en place des lois ( art
6.4,6.3 et 23.3) et donne la possibilité à tous pays membres(143) d’agir
pour faire supprimer les réglementations qui empêcheraient cette
marchandisation - les art 23.3 et 6.4 sont clairs "n’importe quelle loi ou
réglementation intérieure peut-être contestée et sa suppression demandée si
: « .. elle compromet les avantages que les entreprises étrangères pourraient
raisonnablement s’attendre à tirer des accords.. »
Quand une activité (un élément du secteur public, la santé ou l’éducation)
passe dans le champs de l’OMC, ce n’est pas seulement le secteur public qui
est appelé à disparaître mais aussi l’ensemble des « acteurs » de ce secteur,
par exemple pour la santé les mutuelles, les coopératives, les
associations..., puisqu’ils sont mis en concurrence avec les entreprises
privées, qui pourront bénéficier de la clause du « traitement de la nation
la plus favorisée (art 2). » les pays membres devant leur accorder les mêmes
conditions et subventions qu’aux entreprises nationales publiques ou privés,
tout en donnant la possibilité à ces entreprises privées d’engager des
poursuites sur le terrain juridique (voir le cas du CNDP).
Demain c’est tout le secteur de l’Éducation ( et pas seulement la seule
éducation nationale). qui peut être basculé vers le marché mondiale du
travail déréglementé (mode 4 ou volet d’emploi temporaire de personnes
physiques).
De plus la négociation sur l’AGCS, imposée par l’OMC engendre de graves
dangers pour la démocratie. à Marrakech elle a abouti à la signature d’un
pré-accord de quelques milliers de pages qui est demeuré dans sa plus grande
partie secret (en France il n’est consultable qu’au Ministère des Finances,
sans possibilités de photocopies ni de prises de notes) et en dehors de tout
contrôle démocratique, des députés par exemple.
Ce texte, rédigé d’ailleurs dans une langue technocratique incompréhensible,
impose aux pays membres de l’OMC (environ 143, mais 114 concernés par la
négociation) de fournir d’ici le 31 mars 03 la listes des services qu’ils
entendent ouvrir « à la libre concurrence ». C’est ainsi que la France a
informé Pascal Lamy le Commissaire Européen qui négocie au nom de l’Europe,
des services qu’elle entend laisser « démanteler » sur son territoire.
Le texte prévoit qu’un pays (la France) peut refuser d’ouvrir certains
secteurs à condition de dédommager financièrement, à hauteur du préjudice
subi, l’ensemble des pays participants à la négociation ! (art 21.2)
De la même manière les pays peuvent demander une exemption, en principe d’
une durée de 10 ans comme c’est le cas pour la Culture, la santé et l’
éducation selon l’accord signé en 1994 et qui vient donc a échéance en 2004.
Un débat a lieu actuellement à Bruxelles pour savoir si une exemption est
reconductible mais il semble que le tendance « libérale » européenne impose un
refus à cette demande.
Mais beaucoup plus grave ce texte comporte un article (-art 21 ) qui stipule
que toute ouverture est irréversible : c’est une atteinte directe à la
Démocratie. Si demain un autre gouvernement est élu démocratiquement par une
majorité de citoyens, sur une politique de rétablissement ou de renforcement
des « services publics » il ne pourra pas mettre en oeuvre cette politique, car
l’accord AGSC, en violation de la souveraineté nationale, le lui interdit.
Quant à l’art 23.3, il menace les pouvoirs législatifs et réglementaires des
élus, qui ne pourront plus légiférer dans les domaines entrant dans le champ
de compétence de l’AGCS,(voir supra), tout comme le 6.4 et le 3 qui impose
la transparence à chaque état qui doit informer l’OMC de l’adoption ou de la
modification de toute loi et réglementation.
L’absence de réactions des structures syndicales, la collusion à peine
masquée de certains partis, le soutien des autres fait de nous des proies
faciles pour les lobbies tel l’UNICE ( union of industrial and employers
confédération of europ) ou l’ESF (european service forum) à l’oeuvre au sein
de l’OMC.
Ce n’est pas cette société là que nous voulons pour nos enfants.
il nous faut interpeller les élus nationaux et territoriaux pour qu’ils
énoncent publiquement leur position par rapport aux négociations en cours et
notamment leur désaccord sur l’abandon de la souveraineté nationale.
Nous devons d’autre part imposer que toutes les informations soient rendues
publiques et qu’un libre accès aux documents soit autorisé.
Les organisations syndicales, les partis politiques doivent enfin :
informer le plus largement possible l’opinion, des dangers qui menacent la
démocratie
refuser de négocier le plan de « décentralisation » maintenant ou dans un
an,
soutenir et développer les luttes qui sont la seule réponse adaptée à ces
attaques.