M° Corentin Cariou
Les révoltes et les résistances face à l’ordre social injuste se sont multipliées ces dernières années. Les armes des dominants pour les conjurer sont connues : diffuser la peur, diviser pour mieux régner et surtout réprimer et intimider.
Les chiffres sont éloquents : ces dernières semaines des centaines d’arrestations et de condamnations pleuvent suite à la colère exprimée au lendemain du sacre de Sarkozy ; pour le mouvement dit anti-CPE de mars avril 2006 : 4350 arrestations, 1985 gardes-à-vue, 637 procédures judiciaires, une centaine de condamnations à du ferme ; pour la révolte des quartiers populaires de novembre 2005, c’est pire, comme on peut s’y attendre : plus de 5000 arrestations et près de 800 peines de
prison ferme.
En 2007, il y a toujours ces procès absurdes contre les lycéens qui au printemps 2005 ont osé s’opposer à la réforme de l’école promue par Fillon ; dans les universités, les esprits contestataires sont exclus, les faucheurs d’OGM sont jetés en prison ; les sans-papiers, les hommes, les femmes, les enfants « de couleur » sont contrôlés sur le trottoir, dans les cafés, le métro, embarqués, raflés sans égards.
D’ailleurs, la solidarité avec ces derniers est elle-même criminalisée tout comme les nombreuses actions de grève ou d’occupation dans le monde du travail. Tous ceux qui ne vouent pas une allégeance absolue à l’ordre républicain inégalitaire sont traqués ou risquent de l’être.
La « tolérance zéro » est aussi plus diffuse, pur produit d’un consensus droite-gauche construit depuis plusieurs années. Pour quels résultats ? Nous n’oublions pas que l’ordre sécuritaire est assassin. La police s’exerce impunément sur les nomades, les sans-abris, les marginaux, et bien sûr la population des quartiers populaires. Les victimes de « bavures » ont ce point commun d’être pauvres, et souvent de familles provenant des anciennes colonies. Il y a les meurtres policiers pour une attitude, une « incivilité », un « refus d’obtempérer ». Mais de plus en plus la pression est quotidienne, à travers les contrôles en tout genre, les gardes-à-vue, les descentes d’huissiers, la spéculation immobilière, les rouages discriminatoires et expéditifs de la Justice... Et les prisons se remplissent et se multiplient. La répression n’arrêtera ni la misère, ni les injustices, ni la rébellion. Toute solution à long terme passe par la disparition des inégalités sociales et de l’oppression qui en France frappent des millions de personnes.
Alors que les pouvoirs politiques et financiers veulent imposer l’économie marchande et la démocratie policière comme horizon indépassable, ils craignent les révoltes qui font tâche d’huile. D’où une anticipation sous la forme d’un arsenal judiciaire et policier renforcé (lois sur les peines planchers, sur la prévention de la
délinquance, la Sécurité Intérieure, la Sécurité Quotidienne, Contrats Locaux de Sécurité, procédures pour outrage et rébellion, fichage ADN, vidéo-surveillance, biométrie, croisement des fichiers...). D’ancienne garanties démocratiques s’effritent et un processus de quadrillage systématique se met en place, où la répression, fut-elle généralisée, ne frappe pas au hasard. Il s’agit de montrer que l’on contrôle les « classes dangereuses ». Ainsi, en matière politique (sans oublier le pistage et fichage draconiens des « anarcho-autonomes » promis par le ministère de l’Intérieur), les qualifications de « jeunes de banlieue », « casseur », « délinquant », et bien sûr « terroriste » semblent permettre, en jouant sur la peur construite par l\’actualité nationale et internationale, une criminalisation quotidienne à grande échelle.
Aujourd’hui de nombreuses personnes issues de divers courants politiques font ce constat et veulent lutter. Nous devons passer des mots aux actes en construisant une réponse politique et juridique à la hauteur. Nous avons besoin d\’une expression offensive et globale sur le long terme. Nous voulons construire un collectif qui tende vers un front commun contre la répression. C’est aujourd’hui possible et nécessaire, avec un outil durable de solidarité juridique et politique. Il s’agit de réunir les cas de poursuivis et condamnés, mobiliser pour les procès,
organiser la défense, faire cantiner en cas d\’incarcération. Il s’agit aussi de mettre en place un secours militant et une caisse de solidarité. Enfin, le collectif agira politiquement face à l’augmentation des moyens accordés aux politiques répressives...
Nous soutenons toutes les personnes touchées par la répression des révoltes, des luttes sociales et des solidarités
Nous revendiquons l’amnistie pour tous les poursuivis et condamnés de ces mouvements