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Danse à Aix : concentration institutionnelle

Publié, le mardi 25 octobre 2005 | Imprimer Imprimer |
Dernière modification : mardi 25 octobre 2005


Dans la droite ligne du rapport Guillot, un avant goût de ce que nous
réservent (et qui sont déjà à l’oeuvre) les nouvelles politiques
culturelles : concentration des budgets sur les pôles d’excellences,
restriction du champ d’application de l’intermittence...
La suite au
prochain épisode.

Ci dessous :

1/ Communiqué de presse de Patrice Poyet, Directeur de Danse à Aix

2/ Article publié sur le site de la revue Mouvement
http://www.mouvement.net

Un site ou vous trouverez tous les textes de soutiens qui arrivent tous
les jours : http://www.ladanse.com/danse-a-aix/

25/10/2005
CIP-IDF

*********************

- Aix-en-Provence, le 12 octobre 2005

Communiqué de presse de Patrice Poyet, Directeur de Danse à Aix

C¹est en nous couvrant d¹éloges pour le travail accompli, tant par
Danse à Aix et son équipe depuis 30 ans, que par son directeur en
fonction depuis plus de 4 ans, que Madame Maryse Joissains Masini
Député-Maire d¹Aix-en-Provence et Présidente de la Communauté du Pays
d¹Aix nous a confirmé hier soir, en assemblée générale extraordinaire,
que pour des raisons d¹économie d¹échelle la Ville et la Communauté du
Pays d¹Aix transféreraient dès 2006 l¹activité de Danse à Aix au
Ballet Preljocaj nous accordant à titre exceptionnel une subvention
destinée à procéder à notre propre liquidation.

La Drac, précurseur du désengagement vis-à-vis de Danse à Aix,
s¹aligne sur la position de la Ville et de la CPA. La Région et le
Département protestent avec vigueur, déclarant que leur soutien à Danse
à Aix
reste entier et que les subventions qu¹ils nous allouent n¹iront
pas au Ballet en cas de transfert d¹activité.

Nous perdons ainsi les 4/5ème de notre financement et sommes
effectivement dans l¹obligation de cesser notre activité.
Nous sommes très nombreux à avoir toujours défendu l¹idée que dans
notre bassin de population particulièrement dense, non seulement deux
structures chorégraphiques aux missions initiales très distinctes
peuvent parfaitement cohabiter, mais que la pluralité qui en émane
représente une richesse infinie pour notre vie sociale et culturelle.

Le pouvoir politique, sur la proposition d’un projet artistique du
CCN d’Aix-en-Provence, en a décidé autrement. Cette richesse ne pourra
que se réduire considérablement.

La tension entre nos deux structures était palpable depuis 9 ans.
Voilà : le jeu de massacre est terminé : nous tirons notre révérence.
C¹est donc en parfaite santé financière, pleine écoute et
bienveillance du public de la presse et des professionnels que nous
disparaissons.

Je souhaite que cette affaire ait valeur de profonde réflexion pour
chacun d’entre nous, artiste, ou plus généralement acteur culturel, sur
le devenir de nos métiers.

Dans un contexte de redéploiement des crédits de l’Etat, on voit se
renforcer une tendance à l’hégémonie et à la concentration
institutionnelle des projets culturels. Il en découle un
affaiblissement de la diversité artistique et une raréfaction des lieux
susceptibles de la soutenir.
Ces évolutions exigent, de la part de tous, une très grande vigilance.

Patrice Poyet
Directeur

tél : 04 42 96 05 01 - fax : 04 42 96 65 30

******************

- Article publié sur le site de la revue Mouvement
http://www.mouvement.net

La diversité culturelle ne passe pas par Aix-en-Provence.

La municipalité UMP d¹Aix-en-Provence décide de liquider le festival
Danse
à Aix
. Alors que la France défend la diversité culturelle à
l¹Unesco, le ministère de la Culture avalise ici même la concentration
des moyens budgétaires sur quelques grosses structures.

« Sans pluralisme culturel, on étouffe. » Cette formule est de Gilberto
Gil, l¹actuel ministre de la culture brésilien. Elle pourrait être
contresignée par Renaud Donnedieu de Vabres, qui défend au nom du
gouvernement français le projet de convention sur la diversité
culturelle qui est en passe d¹être entériné au sein de l¹Unesco. Dans
une tribune publiée par Le Monde (daté du 19 octobre 2005), le ministre
français estime notamment que doivent être préservées « les conditions
de la création et de l¹expression artistique et
culturelle dans un monde qui tend à devenir de plus en plus uniforme ».
Dont acte. « Sans pluralisme culturel, on étouffe. » Nul doute
qu¹Angelin Preljocaj, chorégraphe français d¹origine albanaise,
n¹apprécie lui aussi à sa juste valeur la phrase de Gilberto Gil. Et
pourtant. La municipalité UMP d¹Aix-en-Provence, conduite par Mme 
Maryse Joissains, a porté un sérieux coup de canif à la « diversité
culturelle » en mettant fin à l¹indépendance artistique du festival
Danse à Aix, et en confiant ses budget et destinées au Ballet
Preljocaj, Centre chorégraphique national d¹Aix-en-Provence, sans
qu¹Angelin Preljocaj lui-même, ni davantage le ministre de la Culture,
ne trouvent à y redire.
Ce véritable coup de force a une valeur hautement symbolique. D¹abord
parce que le festival Danse à Aix, créé en 1977-1978 par une poignée de
militants au sein du Comité des fêtes d¹Aix-en-Provence, a été (avec
les Hivernales d¹Avignon) l¹un des tout premiers festivals à promouvoir
en France la danse contemporaine, éclosion dont est notamment issu un
chorégraphe comme Angelin Preljocaj, soit dit en passant. Danse à Aix a
suivi depuis lors son petit bonhomme de chemin, certes sans grands
moyens, mais avec le charme convivial d¹une manifestation ouverte aux
travaux de jeunes compagnies, notamment régionales, et qui est restée
un peu à l¹écart des mastodontes festivaliers de l¹été. Le patient
travail de Danse à Aix a notamment permis que la ville
d¹Aix-en-Provence accueille en 1996 un Centre chorégraphique national.
Bref retour sur image : en ce temps-là, Angelin Preljocaj, artiste en
résidence à Châteauvallon, décide de quitter le voisinage de Toulon,
alors dirigée par un maire Front national. Le maire radical de gauche
d¹Aix-en-Provence, Jean-François Picheral, décide alors d¹accueillir
Angelin Preljocaj, faisant par là-même un « coup politique » qui ne lui
sera de guère d¹utilité : il sera en effet battu aux élections
municipales suivantes. C¹est un secret de polichinelle : entre la
structure « historique » de Danse à Aix et le Ballet Preljocaj
nouvellement installé, c¹est peu dire que la relation ne fut pas de
tout repos. Nicole Saïd, directrice déléguée du Ballet Preljocaj, n¹a
eu de cesse de réclamer l¹absorption de Danse à Aix par le Centre
chorégraphique. L¹enjeu n¹est pas seulement symbolique, il est aussi
financier. Car en dehors même des (maigres) subventions allouées à
Danse à Aix, le Ballet Preljocaj espérait pouvoir faire tomber dans son
escarcelle la confortable cagnotte culturelle du casino
d¹Aix-en-Provence (1). Cette manne providentielle atteint, certaines
années, les 200.000 euros. Le Ballet Preljocaj a t-il impérativement
besoin d¹une telle somme ?
On pourrait penser que non : ce centre chorégraphique est l¹un des
mieux subventionnés, et on peut supposer que les nombreuses tournées de
la compagnie (y compris à l¹étranger, où elles sont légitimement
soutenues par l¹Association Française d¹Action Artistique) mettent le
Ballet Preljocaj à l¹abri du besoin. Il semble qu¹il n¹en soit rien.

Mais, on l¹aura compris, l¹enjeu n¹est pas seulement financier. Il est
aussi territorial et esthétique. Lors de l¹assemblée plénière de
l¹Unesco, pour se féliciter de l¹accord naissant sur la diversité
culturelle, le représentant de la Jamaïque a eu cette heureuse formule
 : « Les éléphants et les aigles ont pu dialoguer avec les souris. » A
Aix-en-Provence, l¹éléphant-Ballet Preljocaj ignore tant de subtilité.
Ecraser la souris-Danse à Aix lui semble être la seule manière de
garantir son territoire de toute incursion intempestive. Et peu importe
que les recherches actuelles sur la biodiversité prouvent que les
éléphants ont aussi besoin des souris pour survivre. C¹est sans doute
là chose trop compliquée à comprendre pour Mme Joissains. Mais pour
être bête, celle-ci n¹est pas moins animée des meilleures intentions. « 
On ne casse rien, on transfère », déclare benoîtement la dame, en
ajoutant : « Si les gens de Danse à Aix avaient réussi à s¹entendre
avec ceux du Ballet Preljocaj, j¹aurais peut-être considéré les choses
autrement. » Nicole Saïd, largement responsable de cette « mésentente
 », présente pour sa part, la bouche en coeur, l¹absorption de Danse à
Aix par le Centre chorégraphique comme « la seule chance de survie » du
festival. Au royaume des faux-culs, une telle hypocrisie mériterait une
médaille !
Renaud Donnedieu de Vabres, questionné lors d¹une récente conférence de
presse sur la politique de la danse, n¹a pipé mot. Le ministère de la
Culture, qu¹il représente aujourd¹hui, a pourtant une lourde
responsabilité en la matière. Car depuis des années, la Direction
régionale des affaires culturelles de Provence-Alpes-Côte d¹Azur a
délibérément maintenu ’Danse à Aix dans un sous financement lui
interdisant tout réel projet de développement. Et Danse à Aix n¹est pas
isolé. Gageons que, dans un proche avenir, Marseille-Objectif Danse et
le festival Dansem, qui sont déjà dans le collimateur, seront eux aussi
sacrifiés au nom de la sacro-sainte raison comptable des « économies
d¹échelle ». C¹est qu¹au fond, le ministère de la Culture, s¹il a
couvert sans broncher les déboires artistiques et financiers du Ballet
National de Marseille sous la direction de Marie-Claude Pietragalla,
n¹a jamais véritablement consenti que des passionnés puissent être mus,
hors tutelle, par le seul désir de produire et diffuser la danse
contemporaine !
Les soi-disant « économies d¹échelle » (sur le même principe,
Aix-en-Provence pourrait être rachetée par Marseille !) dissimulent des
enjeux esthétiques. Le ministère de la Culture veut aujourd¹hui des « 
pôles d¹excellence », et le Ballet Preljocaj en est un. En témoigne le
projet, certes légitime, du Dance Apprentice Network aCross Europe, qui
réunit le Centre chorégraphique national d¹Aix-en Provence, le Ballet
national de Marseille, et la compagnie de William Forsythe. Une
vingtaine de « stagiaires », soigneusement triés sur le volet de leur
virtuosité technique, pourront suivre « un programme d¹insertion
professionnelle » : bref, de la chair à canons (esthétiques) de la
danse classico-contemporaine. Alors, les pratiques amateurs, les stages
à destination des danseurs-interprètes de la région, que Danse à Aix
avait initiés dans son modeste studio, risquent fort de passer à la
trappe. C¹est clair : Danse à Aix n¹est pas un « pôle d¹excellence » et
n¹offrait pas (seulement) à des spectateurs d¹excellence des corps
d¹excellence. Il est entendu qu¹il faut aussi savoir arrêter certaines
aventures, lorsqu¹elles se figent irrémédiablement. Mais voilà, telle
est la biodiversité culturelle, dans certains cas : un seul festival
vous manque et tout est dépeuplé.

Jean-Marc Adolphe

(1) C¹est une obligation légale : en France, les casinos doivent
reverser une part de leurs bénéfices à des activités culturelles.


Publié le 19-10-2005





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